La signature de la convention entre le Ministère de l’Intérieur français et l’association CODEA pour le cofinancement du projet d’adduction en eau potable, d’assainissement et d’hygiène dans les villages de Djemgheu et Chengne (Commune de Baham, Cameroun) pour un montant de 249.635€, aura lieu ce vendredi 4 mai 2012 à 15h à Paris. Il s’agit d’entériner l’engagement de ce Département ministériel à cofinancer  à hauteur de 42,53% cet important projet dont le budget global est estimé à 586.932€. Les autres contributeurs attendus sont la Commune de Baham (23,25%), le Fonds de Solidarité et de Développement Durable du Grand Lyon/VEOLIA (17,04% par le biais de la Ville de Saint-Germain-Au-Mont-d’Or, non encore acquis), les bénéficiaires (12,89%) et l’association CODEA (4,29%).

Monté par l’association CODEA, le projet AEPAH Djemgheu-Chengne a pour objectif global de contribuer à l’atteinte des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) dans la Commune de Baham. Cet objectif global se décline en trois (3) objectifs spécifiques, à savoir (1) Généraliser l’accès à l’eau potable dans les deux villages voisins de Djemgheu et de Chengne, (2) Améliorer la gouvernance locale du service de l’eau, et (3) Améliorer le taux d’accès à l’assainissement.

Pour accompagner la Commune de Baham dans la réalisation de ce projet, une Assistance à Maîtrise d’Ouvrage assurée par CODEA sera mise en place, doublée d’une Maîtrise d’œuvre assurée par le bureau d’études camerounais EED, www.eedsarl.com et d’une Maîtrise d’Ouvrage Sociale assurée par les Comités de Concertation (CC) des deux villages, sous la coordination de celui de Djemgheu. Le COSIM Rhône-Alpes (www.cosim-rhone-alpes.org) accompagnera ces trois missions de manière transversale. La double expertise franco-camerounaise d’appoint assurée par EED et le COSIM, technique, institutionnelle et socio-économique, assurera l’ensemble des besoins d’études complémentaires et d’élaboration de dossiers de consultation, de formation et d’encadrement des CC et des responsables communaux, et d’animation des relations avec les principaux acteurs du secteur public. Elle assurera en particulier l’encadrement des entreprises de travaux recrutées par appels d’offres communal pour la réalisation des travaux d’infrastructures.

Le projet permet également de mettre à profit la Convention de coopération décentralisée qui lie la ville de Baham à celle de Saint-Germain-au-Mont-D’or en France (région lyonnaise). C’est dans le contexte de cette convention que sera en effet capitalisée l’expérience française en terme de maîtrise d’ouvrage du service public de l’eau et de l’assainissement [1], afin de renforcer les capacités de la Commune de Baham en la matière, conformément aux nouvelles prérogatives communales au Cameroun[2]. La Ville de Saint-Germain-au-Mont-D’or mobilisera 100.000€ pour boucler le financement du projet.

Un schéma innovant, à la fois en terme organisationnel et de distribution de l’eau sera mis en place. En première hypothèse, il implique la Commune comme gestionnaire du patrimoine à travers une régie qui sera créée, et responsabilise les CC en qualité de maîtres d’ouvrage délégués du service public de l’eau. Un exploitant privé des systèmes AEP décentralisés intervient dans la gestion du service public de l’eau dans le cadre de contrats d’affermage, avec des fontainiers pour la vente de l’eau et la possibilité pour les ménages qui le souhaitent de bénéficier de branchements privés contre une participation conséquente. Ce dispositif permettra de satisfaire les besoins de l’ensemble de la population des villages Djemgheu et Chengne, et à terme du village Gouegoua voisin, y compris ceux des plus pauvres, en tenant compte des capacités à payer des différentes catégories socioéconomiques.

L’expérience de la Commune de Baham sera diffusée à la fois (i) aux autres Communes du Département des Hauts-Plateaux (Bamendjou, Bangou et Batié), et (ii) à l’échelle nationale via le portail de CODEA (www.codea-france.org/WordPress).

A la base de ce projet, l’élaboration en 2010 d’une ébauche de schéma directeur AEPAH pour toute la Commune de Baham…

Pour mémoire, le projet AEPAH est le prolongement de l’ébauche de schéma directeur AEPAH élaboré sous la coordination de CODEA à l’échelle des 16 villages de la Commune de Baham en 2010. En terme d’état des lieux,  les résultats obtenus faisaient ressortir une situation en matière d’eau potable caractérisée comme suit :

  • 5 villages (Batossouo, Boukue, Demgo, Hiala, Lagweu) sont traversés par le réseau CAMWATER, alimenté par un château d’eau de 250 m3. Ce réseau dessert actuellement environ 800 abonnés, soit une couverture moyenne de moins de 15% des ménages à Baham. Le taux d’accroissement annuel des raccordements  est estimé à 2% ;
  • 4 villages (Baho, Banka, Bapi, Poumze) ne disposent que de sources traditionnelles, souvent polluées : sources, puits avec seaux et cordes, marigots;
  • 4 villages (Baghom, Cheffou, Medjo, Kaffo) sont proches du réseau CAMWATER et pourraient être alimentés à partir de ce réseau ;
  • Le village de Djemgheu, dispose d’une AEP partielle, alimentée en gravitaire par l’eau d’un ruisseau, avec filtration sur sable desservant 9 bornes fontaines (BF) ;
  • Les villages de Gouegoua et Chengne, ont bénéficié d’une installation Scanwater[3], avec forage, pompe, groupe électrogène, filtration et chloration, alimentant un réseau et quelques BF, l’ensemble étant hors service depuis de nombreuses années.

Au-delà des OMD, l’objectif à terme est de couvrir 100% des 40.000 habitants de Baham, en terme d’Equivalent Point d’Eau (EPE). Concept introduit par le Ministère de l’Energie et de l’Eau (MINEE) pour la quantification des infrastructures d’accès à l’eau potable en milieu rural, un EPE doit desservir en milieu rural entre 250 et 300 personnes environ, avec une dotation journalière fixée à 25 litres par habitant, l’ouvrage devant fournir par jour environ 7,5 à 8 m3 d’eau pendant 12 heures. Le schéma directeur AEP de Baham rencontre ainsi les objectifs poursuivis par les pouvoirs publics camerounais, à savoir assurer la réalisation d’un EPE pour chaque agglomération de 250 à 300 habitants à l’horizon 2015[4], sachant que la situation en 2008 au plan national était d’à peine de 30%.

Pour y parvenir, l’ébauche de schéma directeur pour l’AEP et l’assainissement de Baham opte pour la mise en œuvre des solutions techniques suivantes, selon deux grands sous-ensembles:

1- L’extension et la densification du réseau CAMWATER,  essentiellement dans la partie Nord de la Commune :

1.1. Les réseaux des 5 villages traversés par le réseau CAMWATER sera densifié pour permettre le raccordement facile de toutes les concessions. Les travaux consisteront donc à installer le long des routes desservant des habitations des antennes secondaires et tertiaires de différents diamètres (90 en PVC PN10 ; et 40, 50 et 63 en polyéthylène PN 16) ainsi que des bornes fontaines (en moyenne 1 pour 15 concessions) ;

1.2. Les 4 villages proches du réseau CAMWATER, seront alimentés à partir de ce réseau, de la même façon que les villages déjà traversés par le réseau CAMWATER.

2- La desserte des 7 autres villages, situés au-dessus du château d’eau CAMWATER, par des systèmes décentralisés :

2.1. Un système regroupant les trois villages Djemgheu, Chengne et Gouegoua, qui permettra:

  • La réhabilitation et l’extension du réseau de Djemgheu pour desservir de nouvelles BF à partir des installations existantes, et l’adjonction de branchements privés;
  • La réhabilitation du château d’eau Scanwater de 50m3 du village Chengne situé au dessus de Djemgheu pour la desserte de l’ensemble des quartiers de Chengne (BF et branchements privés), ainsi que les points hauts de Djemgheu;
  • L’extension du réseau au village Gouegoua, limitrophe et situé en contrebas, disposant par ailleurs d’un château d’eau Scanwater et d’une ressource en surface d’intérêt pour le système (7m3/h). Le réseau d’ensemble sera ainsi équipé d’une nouvelle installation avec forage, électropompe raccordée au réseau électrique, système de chloration et d’un réseau de tuyauteries avec différents diamètres (90 en PVC PN10 ; et 40, 50 et 63 en polyéthylène PN16) ;

2.2. Les 4 autres villages (Baho, Banka, Bapi, Poumze) qui ne disposent que de sources traditionnelles seront desservis par des systèmes autonomes, comprenant chacun un château d’eau en béton armé posé au sol, un forage ou un captage dans une rivière proche, une électro-pompe raccordée au réseau électrique, un système de chloration et un réseau de tuyauteries alimentant des BF permettant également l’adjonction de branchements privés. Pour l’ensemble des villages isolés, les choix des réseaux ont été faits en tenant compte, autant que faire se peut, des limites des villages et des altitudes, qui varient de 1.550m à près de 1.900m.

En matière d’assainissement, le taux de couverture national en services d’assainissement était de 30% en 1998, et, en milieu rural, estimé à 15%. Dans ce contexte spécifique, l’assainissement est traditionnel (utilisation de latrines rudimentaires par plus de 70% de la population) avec souvent un rejet dans le milieu naturel. L’accès à un dispositif adéquat d´évacuation des excréta n’est pas évident et il existe donc un grand déficit entre les besoins requis et les services d’assainissement assurés. Pour des raisons évidentes, l’assainissement est cependant considérée par les populations comme moins important que la distribution d’eau potable. L’élimination inadéquate des excréments est pourtant la cause de nombreuses maladies, notamment diarrhéiques et poliomyélites. 


[1] En France, le principe de libre administration des collectivités locales leur permet de gérer les services publics soit directement, soit dans le cadre d’une délégation de service public tout en conservant la totale responsabilité.

 [2] Au Cameroun, les services publics locaux peuvent être exploités en régie, par voie de concession ou d’affermage (art.33 de la loi n°2004/017 du 22 juillet 2004 portant orientation de la décentralisation).

[3] Lancé au début des années 80, il s’agissait d’un projet de construction par l’Etat camerounais de 365 stations identiques (forage, pompe, groupe électrogène, filtration et chloration, alimentant un réseau et quelques BF), selon une logique « du haut vers le bas », pour un investissement total de l’ordre de 76.224.509€, entièrement financé par l’Etat.

[4] Un robinet de borne fontaine, un puits avec pompe manuelle ou un forage avec pompe manuelle sont équivalents à 1 EPE. Un forage avec 2 pompes manuelles est équivalent à 2 EPE. Une adduction avec 5 robinets est équivalente à 5 EPE.